Décintrement des voûtes

1  Introduction

Les cintres entrent dans la construction et la restauration des arcs, des voûtes des édifices et de celles des ponts. Ils ont pour fonction de soutenir temporairement les claveaux (ou voussoirs) pendant la construction ou bien lors d’opérations de réparation.
Il existe peu d’informations techniques fiables sur l’utilisation des cintres pour la construction des voûtes au Moyen Âge, pas plus pour celles de L’Époque Moderne. Les rares textes décrivant la technique des cintres au Moyen Âge datent du XIXe siècle.
A contrario, une littérature abondante concerne l’édification des ponts en maçonnerie de la fin du XVIIIe siècle au début du XIXe siècle, avec un retour d’expérience précis sur les édifications ayant eu lieu depuis le XVIIIee siècle (avec notamment le mémoire de ). Les textes reflètent alors l’évolution des techniques, contemporaines des ponts construits, avec l’amélioration des processus et leur adaptation aux nouveaux matériaux (ciment) et aux portées toujours plus grandes.
Le décintrement est une étape critique, qui entraîna la chute de nombreuses voûtes d’ogives au Moyen Âge comme le rapporte Aubert (1934, p.223) et Aubert (1961, p.185). Alberti (1485, L.III.14) souligne l’attention à apporter à cette étape.
Les deux thématiques principales abordées dans les traités d’architecture et de construction concernant les cintres sont :
  • la durée pendant laquelle la voûte doit (ou ne doit pas) être laissée sur cintre après la mise en place de la clé, et les tassements ou fissures qui découlent de ce choix
  • la force (au sens de section) à donner aux éléments de charpente constitutifs des cintres, et par conséquent la détermination des efforts qu’il supportent – qui fera l’objet d’un autre article
Nous abordons dans ce premier article la question du décintrement des voûtes tel qu’il est abordé dans les traités d’architecture et de construction. Les sources disponibles à ce sujet concernent en grande majorité les ponts, en particulier à partir de la publication du mémoire de Perronet en 1773, et beaucoup plus rarement les voûtes d’édifices. Continuer la lecture de « Décintrement des voûtes »

Résistance et stabilité des remplages

1  Introduction

Les remplages, supports des vitraux dans les édifices religieux, sont un élément aussi caractéristique de l’architecture gothique que le sont les voûtes. L’évaluation de leur résistance et de leur stabilité a cependant fait couler beaucoup moins d’encre que celle des voûtes. Exposés aux tempêtes, les remplages ont été progressivement amincis au cours de l’histoire dans la quête d’une plus grande légèreté visuelle et d’une plus grande transparence à la lumière. Et ce jusqu’à atteindre la limite de leur résistance, ce dont témoigne certains effondrements ou reconstructions de remplages particulièrement ambitieux, comme celui de la grande baie sud du bras sud du transept de la cathédrale de Nantes (reconstruit vers 1641 quelques années après sa construction) ou les fenêtres hautes du transept de la cathédrale de Bayeux (remplages remplacés au début du XIXe siècle par un treillage métallique, jusqu’à leur progressive restauration depuis 2019).
Fig 1: Exemples de remplages, cathédrale de Bayeux, de Chartres et d’Orléans
La stabilité des remplages dépend à la fois de la résistance des pierres qui composent le remplage et, dans une moindre mesure en général, des barres métalliques, appelées barlotières, qui portent les panneaux de vitrail.
Lors de la construction des remplages au Moyen Âge, ces derniers ne faisaient pas l’objet d’un dimensionnement par le calcul au sens où on l’entend aujourd’hui. Il existait probablement des règles de proportion, comme pour la conception des arcs et des voûtes (Huerta Fernández, 2006), mais ces dernières ne sont pas connues pour les remplages1. Un ensemble de vérifications (résistance à la compression, au flambement, à la pression du vent etc.) a été proposé par Ungewitter à la fin du XIXe siècle dans son ouvrage sur les constructions gothiques (Ungewitter et Mohrmann, 1903). Ungewitter prend soin, à plusieurs reprises, d’insister sur la bonne concordance de ses résultats avec l’expérience que nous livrent les édifices gothiques.
Nous présentons dans cet article un résumé de ces vérifications, complétés par nos observations. On retiendra, comme souvent pour les monuments anciens, le caractère anachronique de ces vérifications calculatoires. Néanmoins, elles permettent de poser un cadre explicite pour comparer les remplages entre-eux du point de vue de leur résistance et stabilité.
Rappelons en introduction quelques éléments de vocabulaire qui seront utilisés dans la suite. On note en italique les termes en anglais et allemand pour faciliter la lecture de Ungewitter et Mohrmann (1903).
  • remplage : ensemble des assises et claveaux en pierre de taille qui divisent l’ouverture en plusieurs compartiments (lancettes, roses, écoinçons etc.) – tracery, Masswerk
  • meneau : « élément vertical d’un remplage » (Pérouse de Montclos, 2007, p.195 )mullion, Pfosten
  • demi-meneau, meneau de rive : demi-meneau construit contre le jambage – half-mullion, wall mullion, Wandpfosten
  • réseau : partie du remplage situé au-dessus des meneaux
  • barlotières : barres métalliques horizontales, supports du vitrail – storm bars, Sturmstangen. Le vitrail est fixé sur les barlotières par le moyen d’un feuillard (cover bar, Deckschiene) fixé par des clavettes traversant des pannetons placés tous les 20 à 30cm (projecting clamps, Lappen, Krampen)
  • vergettes : barres métalliques de faible section (6 à 10mm selon Ungewitter) qui permettent de renforcer les panneaux de vitrail contre les efforts horizontaux du vent
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Étude des rapports entre stéréotomie et résistance des voûtes clavées

Le rythme de publication des articles sur ce site concernant la structure des monuments anciens a notablement baissé ces dernières années pour une raison simple : je préparais une thèse sur l’influence de la coupe des pierres sur la stabilité des voûtes, intitulée : Étude des rapports entre stéréotomie et résistance des voûtes clavées. La thèse a été soutenue le 13 décembre 2017, et le manuscrit est désormais disponible à cette adresse :
URL https://tel.archives-ouvertes.fr/tel-01834617. Continuer la lecture de « Étude des rapports entre stéréotomie et résistance des voûtes clavées »

Recherche textes anciens

Recherche de textes anciens

Les textes anciens sont des sources d’informations précieuses dans le domaine de l’histoire de la construction : traités, encyclopédie, articles etc. Bien que la numérisation des ouvrages ait mis à la portée de tous ces textes, ils sont cependant dispersés sur divers sites internet, ce qui peut rendre leur consultation difficile. Nous proposons ci-dessous un outil créant automatiquement une liste de liens pour effectuer une même recherche à partir d’un mot clé sur de nombreuses sources disponibles en ligne.
L’usage de cet outil est simple. Par exemple, entrez balcon dans le formulaire, cliquez sur le bouton pour générer les liens, et une liste de liens vers les pages de résultats de recherche correspondant au mot balcon apparaitra ci-dessous. Pour chercher une expression exacte, utilisez des guillemets, par exemple « poutres armées ».
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Planchers à fers méplats

1  Introduction

En 1845, les seuls planchers métalliques utilisés en France pour les logements sont les planchers à fermette. Chaque fermette nécessite l’assemblage de nombreuses pièces métalliques. Vaux fait breveter1 en juillet 1845 un système de plancher plus simple. Il remplace les fermettes par des fers méplats posés de champ2 (Fig. 1).
Ce système rencontre le succès face aux planchers à fermettes, en raison de sa simplicité. Opperman écrit en 1856 à propos des planchers à fers méplats c’est le plus simple et le plus ancien système employé [parmi les systèmes présentés par Opperman] (1856 [9]). Denfer écrit en 1894 : « Ce système, dû à M. Vaux constructeur, s’est beaucoup répandu à l’origine des planchers en fer. » (1894 [4,p.297]). Lemoine qualifie le système de Vaux de très simple et très populaire (1993[7]). Cependant, contrairement aux planchers à fermette dont des exemples très connus sont publiés dans la littérature (voir notre article précédent sur les fermettes à ce sujet), la littérature de l’époque ne donne pas d’exemples de bâtiment publics où ont été construits les planchers à fers méplats de Vaux.
Plancher à fers méplats vue 3D
Fig 1: Plancher à fers méplats, vue d’ensemble
d’après Janniard 1847 [5]
Plancher à fers méplats détails des entretoises et fantons
Fig 2: Plancher à fers méplats, détail des entretoises et fantons
d’après Janniard 1847 [5]
Nous décrivons dans cet article les caractéristiques techniques des planchers à fers méplats, tels que ces derniers sont décrits dans les années 1840 à 1860.
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Planchers à fermettes

1  Introduction

Les premiers planchers d’habitations construits en France avec des poutrelles métalliques en I datent de la fin des années 1840. D’autres types de planchers métalliques ont été construits cependant avant cela1. Nous présentons ici le cas des planchers à fermettes. Ces derniers apparaissent dans les années 1780 et sont employés jusque 1850 environ.
Fermettes métalliques de planchers métalliques anciens d'après Denfer
Fig 1: Fermettes
d’après Denfer 1894 [3] scanné par la BNF
Les planchers à fermettes sont composées comme leur nom l’indique de fermettes métalliques, telles que celles visibles sur la figure 1. L’espace entre les fermettes est hourdé en poteries creuses ou en plâtras. Continuer la lecture de « Planchers à fermettes »

Epure de Méry

1  Introduction

L’épure de Méry permet d’évaluer la stabilité d’une voûte en berceau en quelques étapes simples de dessin. Nous introduirons l’épure par un exemple pratique dans la première partie de cet article. Cette exemple ne nécessite pas de prérequis particuliers sur la stabilité des voûtes. Il permet de prendre en main de façon concrète la méthode.
Il est possible qu’à la fin de cette première partie, le lecteur trouve que notre présentation ne correspond pas à ce qu’il connaît de l’épure de Méry. La raison est simple : la méthode publiée par Méry en 1840 est modifiée progressivement au XIXe siècle. Différentes simplifications y sont apportés, sans pour autant entraîner de changement du nom de la méthode, qui continue à être appelée épure de Méry, méthode de Méry ou règle de Méry. L’expression méthode des courbes des pressions hypothétiques est plus rarement employé pour désigner la méthode de Méry.
Nous proposons donc un article à plusieurs niveaux de lecture. La première partie, qui présente de façon concrète l’application de l’épure de Méry intéressera les lecteurs qui ne sont pas familiers avec cette dernière. La seconde partie présente une synthèse du mémoire de Méry de 1840, puis les modifications de la méthode de la seconde moitié du XIXe siècle. Cette partie permettra aux lecteurs qui connaissent déjà l’épure de Méry sous une forme différente, de situer leur pratique par rapport à l’épure de Méry d’origine. Nous verrons ensuite l’évolution de cette méthode d’un point de vue historique. Nous chercherons enfin à comprendre l’origine du succès de cette méthode, par rapport à la construction des polygones funiculaires à l’aide de la statique graphique. Continuer la lecture de « Epure de Méry »

Corniches en encorbellement

1  Introduction

Les corniches sont un des éléments les plus communs de l’architecture. Pour les bâtiments prestigieux ou ordinaires, les corniches forment le couronnement des têtes de mur. Elles ont pour les murs à la fois un rôle d’ornement, et un rôle utilitaire en protégeant les murs contre les eaux pluviales. Leur caractéristique structurelle principale est leur saillie, qui est essentielle pour leur permettre d’assurer ces deux rôles.
L’histoire des corniches a fait l’objet d’articles d’encyclopédie, par Diderot et d’Alembert, Viollet-le-Duc, Planat etc. Ces articles sont consacrés principalement aux aspects ornementaux. Ils apportent cependant quelques informations utiles concernant la stabilité des corniches. Nous explorons dans cet article les corniches de différentes manières. Dans un premier temps, nous exposerons les informations qui peuvent être tirées des sources concernant l’histoire de l’architecture. Nous tracerons ainsi les grandes lignes de la construction et l’équilibre des corniches dans l’Antiquité, au Moyen-Age, et à la Renaissance. Nous verrons ensuite l’apparition des règlements qui imposent des dispositions constructives pour les corniches au XVIIIe et XIXe siècle, et leur transposition dans les cours et traités d’architecture. Nous verrons enfin quelques points particuliers concernant l’équilibre des corniches.
Plusieurs modes de présentation des corniches étaient possibles pour cet article : parcours chronologique des types de corniches, parcours chronologique des sources, parcours typologique etc. Nous avons privilégié un parcours chronologique des types de corniches, pour être le plus clair possible. Cependant cette présentation chronologique masque un fait essentiel. Les sources utilisées ici concernant les corniches de l’architecture antique jusqu’au début du XVIIIe siècle sont uniquement des sources postérieures au début du XVIIIe siècle.
Palais Strozzi à Florence avec corniche imposante avant 1908
Fig 2: Palais Strozzi à Florence, avec corniche imposante, avant 1908
d’après Grundriß der Kunstgeschichte / Wikimedia Commons
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Balcons en encorbellement

1  Introduction

Les premiers balcons en encorbellement construits à Paris datent du milieu du XVIIe siècle. Les informations concernant la structure des balcons antérieurs au XIXe siècle sont relativement peu nombreuses1. En effet, la plupart du temps les études concernant les balcons s’intéressent aux gardes corps en ferronnerie des balcons, souvent au détour d’études plus vastes sur l’histoire de l’architecture (e.g. Babelon 1974 [1] et 1975 [2]), et parfois spécifiquement (Gérard 1999 [19]). De manière générale, le caractère décoratif des balcons éclipse les aspects structuraux de ces derniers.
Nous commencerons cet article en présentant l’apparition des balcons au XVIIe siècle en France. Nous verrons ensuite la typologie des balcons du point de vue structurel, en présentant les différentes formes qui composent le balcon, et leur influence sur la stabilité de ce dernier.
Nous considérons dans cet article les balcons en encorbellement principalement. Nous verrons cependant également les balcons à consoles en fer forgé dans la première partie concernant l’apparition des balcons en France. Les balcons avec consoles en fer forgé sont en effet des construction en surplomb, mais ils ne correspondent pas à des structures en encorbellement. Continuer la lecture de « Balcons en encorbellement »

Stabilité des encorbellements

1  Introduction

La stabilité des encorbellements, en particulier des corbeaux et des consoles, met en jeu à la fois des notions d’équilibre et de résistance. Adam en donne une description dans son livre La construction romaine : matériaux et techniques, qui résume en quelque lignes la simplicité apparente du problème :
Statiquement, l’encorbellement est constitué d’une pièce possédant une partie en appui et une partie en saillie, la première devant être suffisamment pesante pour éviter la bascule ; la seule précaution des constructeurs consiste donc à charger la partie en queue dont la longueur dont être supérieure à la saillie. Il convient également d’estimer empiriquement, les limites de résistance du matériau, afin de s’opposer par une épaisseur suffisante à sa rupture sous l’effet de la flexion.
Adam 1989 [1,p.179]
Un corbeau dont la queue n’est pas chargée ne peut avoir une saillie supérieure à la longueur de sa queue (voir l’article d’introduction aux encorbellements pour la définition de ces termes). Bien souvent, la saillie du corbeau est bien inférieure à la queue pour des questions de sécurité. Il existe de nombreuses méthodes différentes pour permettre l’augmentation de la saillie possible pour un encorbellement. La présentation du fonctionnement statique des encorbellements que nous aurons vu dans la première partie, permettra ensuite de mettre en avant les moyens particuliers employé par les constructeurs anciens pour assurer la stabilité des encorbellements. Nous relierons à chaque fois ces différentes pratiques au gain en équilibre ou en résistance correspondant. Nous verrons que ces dispositifs constructifs sont assez souvent invisibles pour l’observateur extérieur. Nous verrons enfin rapidement les méthodes qui étaient utilisées pour choisir les dimensions à donner aux corbeaux et consoles qui composent les encorbellements. Continuer la lecture de « Stabilité des encorbellements »